Découlant de ce "MANDAT" que nous appellerons contrat d'entreprise, nous soumettons que se rattache tout de même l'obligation de renseigner sur les conditions et les risques de son "engagement" verbal et/ou écrit.
Puisque l'huissier de justice québécois n'est pas celui de qui origine la procédure d'instance, il lui appartient donc de prévenir son client avocat des difficultés potentielles de parcours lors d'une éventuelle exécution pouvant nécessité, à titre d'exemple, la présence et l'assistance de spécialistes ou encore requérant avant la mise en application d'une saisie à caractère distinctif, une ordonnance spécifique devant légitimer les gestes à poser et qui, à défaut, entraînerait sa responsabilité [1]. D'ailleurs à ce sujet et en règle général quand une difficulté surgit en cours d'exécution d'une décision de justice, nos confrères français apprécient et déterminent s'ils peuvent passer outre ou s'ils doivent saisir le juge des référés ou encore chez nos confrères belges au juge des saisies et cela sous leur entière responsabilité [2].
Toutefois, au Québec, à l'exception d'une ordonnance d'ouverture de portes et quelques autres requêtes mineures, il n'est pas encore permissible à l'huissier de justice de référer par lui même à un tribunal ou un juge, il doit notamment s'en remettre à son mandant dominus litis (client) qui avisera alors le tribunal par voie de requête. Conséquemment, nous sommes convaincus que dès que mis en possession du titre exécutoire, l'huissier de justice québécois se doit à établir en collégialité avec son client les mesures préliminaires, préparatoires ou complémentaires nécessaires à l'accomplissement de ses actes, et cela, préalablement àl'exécution sereine de son devoir.
Nous sommes également d'opinion qu'à titre de " prestataire de services " nous avons une obligation générale d'informer le client, avant la conclusion du contrat, de tout ce qui peut être relatif à la nature de la tâche qu'il s'engage àeffectuer ainsi qu'aux biens et au temps nécessaires à cette fin comme le précise d'ailleurs en ces termes le code civil québéçois:
Peut-être que les tribunaux s'inspireront de la jurisprudence qui s'est développée en matière médicale sur la notion de « consentement éclairé » et « d'obligation d'informer le patient » ?. De cette manière, il n'y aura pas de péril en la demeure, ni de retard inconsidéré, d'autant plus que les préjudices seront largement limités dû au fait qu'il aura agit avec prévention en observant des normes de prudence que tout huissier de justice avisé, placé dans les mêmes circonstances de faits, est tenu de respecter.
A l'instar de nos confrères de Belgique et sauf faute personnelle, l'huissier n'endosse pas la faute que peut commettre son mandant dans l'appréciation de sa créance ou de la régularité de son titre mais, l'huissier qui n'est pas un simple agent d'exécution ou un instrument aveugle aux mains d'un plaideur, engage sa responsabilité s'il prête son ministère àl'accomplissement d'un acte vexatoire ou fondé sur un titre manifestement illégal ou irrégulier.
Les instructions reçues même d'un avocat ne sauraient le dispenser de tout contrôle [4] D'autant plus que l'huissier commetterait un acte dérogatoire s'il tenait compte de toute intervention qui pourrait l'influencer dans l'exécution de ses devoirs professionnels au préjudice de l'une des parties[5].
Nos devoirs professionnels nous imposent de suivre les dispositions du code de procédure civile ou de toute autre loi ou règlement concernant notre fonction, le fait d'aller àl'encontre d'iceux serait sujet à des plaintes disciplinaires[6].
Les obligations du mandant (client):
Dans le code civil du Québec, il est prévu à l'art. 2149 C.c.Q que le mandant est tenu de coopérer avec le mandataire de manière à favoriser l'accomplissement du mandat.
Même, et nous l'avons vu, en tant qu'officier public, si l'huissier de justice ne semble pas être expressément décrit ou défini en jurisprudence, comme mandataire, il n'en demeure pas moins que par analogie, ces mêmes critères devraient être d'application puisque à titre accessoire et non principal, le mandant/avocat qui pourrait être qualifié de client et le mandataire/huissier de justice qui pourrait employé le qualificatif de prestataire de services ont tous deux une obligation de résultat.
Ce n'est qu'une fois le scénario complété que l'huissier de justice agira de sa propre initiative et en fonction des balises et paramètres qu'il aura mis en place au préalable et en toutes connaissances de cause avec son mandant/client dans la mesure où la mission à lui confiée, nécessite une plus grande expertise et des moyens plus élaborés pour agir et comme nous pourrons d'ailleurs le constater en matière de saisies reliées au domaine informatique.
Tout comme l'huissier, l'avocat a l'obligation légale d'agir et cela même en l'absence d'instructions spécifiques de son client lors de l'exécution d'une ordonnance[7].
Il doit donc tout mettre en oeuvre pour que la résultante de la procédure qu'il intente soit la plus complète et la plus efficace possible dans la mesure où la loi le lui permet.
De plus, déontologiquement parlant, face aux ordonnances des juges, l'avocat est toujours tenu de soutenir l'autorité des tribunaux[8].
Ceci implique qu'une fois l'ordonnance émise, tout avocat est lié par le respect de cette ordonnance et se doit d'y collaborer, qu'il soit en demande ou en défense ou encore lorsque ce dernier représente un tiers.
Toutefois, si l'on considère qu'en droit québécois, il s'agit plutôt d'un contrat de service, le code civil aux arts. 2098 et suivants traitent du sujet en ces termes:
En conclusion, avant d'entreprendre notre chapitre axé sur l'informatique, l'on peut remarquer dès lors des libellés de ces articles, le soin qu'ont mis les codificateurs à prévoir autant que faire se peut, le plus grand nombre de cas d'intervenants possible à l'intérieur de la société Québécoise et cela, même si notre fonction quelque peu particulière n'a pas semblé faire l'objet d'une attention spécifique.
Somme toute, que nous soyons des huissiers de justice de Belgique, de Pologne ou d'ailleurs, nous sommes d'opinion que nous pouvons aisément se retrouver à l'intérieur de ces paramètres et agir de façon fonctionnelle et professionnelle eu égard aux droits des parties et de notre fonction d'officier de justice.
[2] Juris-classeur- Responsabilité civile des Huissiers Nos. 35 à 39- arts. 1382 à 1386 C.C. (France).(retour)
[4] En ce sens, Traité des saisies, règles générales- Pr. Georges de Leval, Université de Liège- 1988 page 66, par.E.(retour)
[5] Règlement déterminant les actes dérogatoires à la dignité de la fonction d'huissier- Loi sur les Huissiers de Justice- (L.R.Q., 1974- ch.13- section 2, art 2a.).(retour)
[6] Article 2u) section 2. Loi et règlements de déontologie sur les Huissiers de Justice du Québec- (L.R.Q., 1974- ch.13).(retour)
[7] Lawyer's professional liability- Butteerworths- Stephen M. Grant & Linda R. Rothstein- chap. 6 (G), page 70.(retour)
[8] Code de déontologie des avocats québécois, section 1, disposition générale- art. 2.06- L.R.Q. c.C-26- Recueil de documentation professionnelle- Soquij 1991.(retour)