Comment semi-automatiser l’éditique afin de gagner du temps et de l’argent

L’éditique est l’opération consistant à placer le texte sur une page de manière à en améliorer l’apparence. Cette technique provient du monde de l’imprimerie dans lequel les typographes devaient initialement organiser des caractères physiques (lettres et symboles) pour les imprimer sur papier. Évidemment, ce travail est maintenant effectué de façon entièrement numérique à l’aide de logiciels dédiés, tels qu’Adobe InDesign, LaTex ou QuarkXPress. Toutes ces solutions sont conçues pour faciliter la définition de la taille adéquate des marges, le choix des polices et leur taille, ou bien la définition des styles appropriés pour les paragraphes. Ils servent à produire des brochures, des magazines, des livres et des rapports officiels qui sont généralement partagés électroniquement au format PDF.

Certains diront qu’à l’ère d’Internet où le HTML est roi, un éditeur en ligne comme Lexum devrait faire campagne pour l’abandon de cette approche ancrée dans l’histoire de l’impression. Et en fait, nous avons agi de la sorte pendant de nombreuses années. Cependant, nous avons aussi réalisé que de nombreuses institutions juridiques sont soucieuses de préserver l’apparence et la convivialité de leurs publications imprimées officielles, même dans le cadre de leur transformation en produits entièrement numériques. Cela peut résulter d’une volonté de respecter les traditions, du désir de maintenir un certain niveau de lisibilité dans l’environnement électronique ou bien d’insuffler de l’authenticité au nouveau format. Mais en réalité cela s’explique probablement par un mélange de toutes ces raisons. Dans tous les cas, le besoin de produire des publications formatées et assemblées par des professionnels ne disparaitra pas à court terme, et demeurera en parallèle au besoin de rechercher des bases de données constituées de leurs composantes.

Dans ce contexte, nous avons agi sur deux fronts. Tout d’abord, il y a quelques années, nous avons annoncé des changements à la façon dont nous publions les fichiers PDF afin de répondre aux exigences de publication numérique les plus sophistiquées. Deuxièmement, nous avons commencé à offrir des services d’éditique à nos clients produisant des publications officielles. Mais au lieu d’appliquer manuellement leurs politiques éditoriales une page à la fois, les typographes de Lexum ont conçu un moyen d’utiliser des règles heuristiques afin d’automatiser une grande partie de leurs tâches. En automatisant l’insertion de balises de mise en forme dans le corps des fichiers originaux, notre personnel uniformise une grande partie des exigences éditoriale avant même d’ouvrir les fichiers avec un logiciel d’éditique. Cette approche réduit considérablement le nombre d’interventions manuelles requises dans chaque fichier, ce qui se transforme en économies pour les clients.

L’exemple suivant montre les balises insérées dans le corps du fichier MS-Word de la version française d’une décision de la Cour suprême du Canada à être inclue dans un volume à deux colonnes des Recueils de la cour :

Ce balisage est facilité par l’utilisation de macros Word. Celle-ci insère la balise <pstyle: Corps FR> illustrée ci-dessus lorsque nécessaire :

La même approche est utilisée afin de s’assurer que les attributs de texte (tels que l’italique, gras ou souligné) ne sont pas perdus lors de la conversion vers la solution d’éditique. En plus des styles, de nombreux éléments de mise en forme sont insérés de la même manière. Par exemple, les espaces réguliers peuvent être systématiquement remplacés par des espaces insécables afin d’éviter les séparations inappropriées en fin de ligne. De plus, il permet d’identifier et de corriger automatiquement les erreurs courantes de formatage, telles que l’utilisation d’un double espace à la fin d’une phrase, ou bien l’utilisation de guillemets simples au lieu de guillemets doubles en anglais.

En fin de compte, au lieu de devoir traiter manuellement chaque page, seules les exceptions à la politique éditoriale de chaque projet nécessitent une intervention de la part de notre personnel. Cette approche permet à nos typographes de se concentrer sur les opérations de contrôle de qualité, plutôt que sur les tâches de production. L’efficacité s’en trouve même améliorée au fil du temps, car de plus en plus de règles sont conçues et mises en Å“uvre pour détecter les exceptions récurrentes. Inutile d’ajouter que cette approche permet également de réduire les délais dans le cadre de projets ayant de courts cycles d’édition.

De toute évidence, la semi-automatisation des tâches d’éditique avec un tel balisage nécessite d’investir un effort initial supplémentaire afin de concevoir et d’ajuster les macros et les scripts requis. Pour les petits projets ponctuels, ce travail supplémentaire n’en vaut peut-être pas la peine. Cependant, pour les projets impliquant des périodiques ou tout autre type de travaux récurrents, les économies générées au fil du temps dépassent rapidement la charge supplémentaire initiale.

Les exemples et des illustrations ont été fournis par Philippe Lanthier.